(pastiche de Thomas Bernhard)
Être père pour se prouver qu’on est un mauvais père, ou pour lutter contre le déterminisme d’être le fils d’un mauvais père devenant à son tour un père pitoyable, répétant à la génération d’après l’échec de la paternité, dans une rivalité mimétique avec le père, avec la conviction qu’on ne peut pas faire plus mal que lui mais sans la certitude de faire mieux, et toujours obsédé par le modèle, ou l’anti-modèle du père qu’on n’a pas eu, qu’on ne voudrait pas être, ne parvenant pas à se dégager de l’emprise mimétique, écrivant ceci pendant que les enfants se battent, quittant les enfants réels pour écrire à propos des enfants imaginaires, multipliant les paternités une fois, deux fois, trois fois, quatre fois, ou plutôt deux fois deux fois, comme il disait pour faire comprendre sa double vie, ou plutôt ses deux vies consécutives, maudissant la paternité, le temps que ça lui prenait et en même temps trouvant en elle l’énergie de vivre en se dépassant dans un autre que lui, tâchant de réaliser qu’il était père, de devenir un père réel, ne réussissant à la fin qu’à être un père-copain, un père-camarade, un père-pitre, un père en pire, ratant la paternité comme son père mais en cela supérieur à lui parce que le sachant.